La ceinture de feu du pacifique constitue un arc volcanique qui borde l’océan pacifique sur une longueur d’environ 40 000 kilomètres. 452 volcans y sont répertoriés, coïncidant avec la ligne de rencontre de plusieurs plaques tectoniques convergentes qui glissent l’une sous l’autre par subduction. Ces zones de friction, fortement impactées par des éruptions volcaniques et des séismes, se caractérisent par la présence de fosses océaniques dont la profondeur varie avec la pente du plan de subduction.
La fosse d’Izu-Ogasawara 伊豆・小笠原海溝, d’une profondeur de 9 788 m, fait partie de la ceinture de feu du Pacifique. Elle s’étend de l’île principale du Japon, Honshû 本州, pour descendre vers le sud-est et rejoindre la fosse des Mariannes à proximité de l’île de Guam.
En 2022, une équipe internationale de chercheurs de l’université des sciences et technologies marines de Tokyo et de l’université d’Australie occidentale a entrepris une expédition de deux mois à bord du navire « DSSV Pressure Drop » pour explorer la zone hadale (zone de profondeur supérieure à six kilomètres) des tranchées qui longent l’archipel japonais.
La mission, baptisée « Expédition ceinture de feu Japon 2022 », était sous la direction du professeur Alan Jamieson de l’université d’Australie occidentale et consistait à explorer les fosses d’Izu-Ogasawara et des Ryûkyû 琉球海溝 à respectivement 8 000 m, 9 300 m et 7 300 m de profondeur, dans le cadre d’une étude de 10 ans sur les processus géologiques actifs, les organismes et écosystèmes existants ainsi que sur leurs interactions dans les eaux les plus profondes de la planète.
Au cours des sept plongées effectuées avec le « HOV Limiting Factor », seul submersible au monde capable d’atteindre 11 000 m de profondeur avec deux personnes à bord, de précieuses données ont pu être récoltées ainsi que divers échantillons prélevés.
Les résultats de l’« Expédition ceinture de feu Japon 2022 » ont été publiés en avril 2023, avec notamment la présentation d’une vidéo révélant un poisson évoluant paisiblement à une profondeur de 8 336 m dans la fosse d’Izu-Ogasawara, où la pression est 800 fois plus élevée qu’à la surface de l’océan.
Le poisson observé était un jeune spécimen de poisson-limace Pseudoliparis de la famille des Liparidae. D’après les scientifiques, sa présence à cette profondeur pouvait être expliquée par la température d’eaux plus chaudes aux alentours et le fait que les jeunes spécimens avaient tendance à s’aventurer plus en profondeur que les adultes.
« Nous avons passé plus de 15 ans à étudier ces poissons-limaces des profondeurs, explique le professeur Alan Jamieson. Il y a tellement plus à découvrir sur eux que simplement leur profondeur, mais la profondeur maximale à laquelle ils peuvent survivre est vraiment stupéfiante.
Dans d’autres tranchées telles que la fosse des Mariannes, nous les trouvions à des profondeurs de plus en plus importantes mais en nombre de plus en plus faible, rampant juste au-dessus de cette marque de 8 000 m, mais autour du Japon elles sont vraiment assez abondantes.
Les tranchées japonaises sont des endroits incroyables à explorer. Elles sont si riches en vie, même aux plus grandes profondeurs ».
Quelques jours plus tard, l’équipe a réussi à prélever deux spécimens de poisson-limace Pseudoliparis à environ 8 022 mètres de profondeur dans la fosse du Japon. Selon l’université d’Australie occidentale, ces spécimens seraient les premiers poissons jamais prélevés à des profondeurs supérieures à 8 000 mètres.
La précédente plus profonde observation de poissons des abysses avait été faite à 8 178 m en 2017, dans la fosse des Mariannes. L’« Expédition ceinture de feu Japon 2022 » détient à présent le nouveau record pour l’observation et la vidéo d’un poisson à 8 336 m de profondeur, record du plus profond poisson enregistré au Guiness World Records.
Sources : NHK, Université des sciences et technologies marines de Tokyo, Université d’Australie occidentale, Guiness World Records